Pourquoi pratiquer le travail d’armes en vieillissant ?
L’arme ne rouille pas… quand l’esprit reste affûté.
Il y a des noms qui font rêver dans le monde français des arts martiaux : Shimabukuro, Lavorato, Mochizuki… Des maîtres d’exception, à la longévité martiale presque légendaire. On les voit à 70 ans bien passés, toujours actifs, toujours précis, toujours justes.
Mais voilà la vérité : nous ne sommes pas tous égaux face au temps. La biologie a ses lois, et l’âge ne frappe pas tous les corps avec la même intensité. Certains s’entraînent encore à 60 ans comme à 30. D’autres doivent composer avec des douleurs chroniques, des articulations récalcitrantes ou une mobilité réduite.
Et pourtant… il y a une voie, noble et accessible, pour continuer à s’épanouir dans la pratique martiale : le travail d’armes. Une lame bien tenue ne demande pas un corps jeune. Elle demande un corps sincère. Et surtout, un esprit présent.

Accepter le changement, sans renoncer à la Voie
Quand on commence à ressentir les limites du corps, qu’on le veuille ou non, une décision s’impose : soit lutter contre ces signaux et risquer de se blesser, soit adapter intelligemment sa pratique. On ne peut plus chuter, recevoir des clés articulaires, lever les jambes… chacun ses douleurs, chacun ses souvenirs.
C’est là que le travail d’armes prend tout son sens. Il ne s’agit pas de « faire moins », mais de faire autrement. L’arme transforme la relation au corps : elle exige une posture juste, un placement précis, une attention permanente. Elle réduit l’importance de la force brute au profit de la fluidité, du relâchement, du timing. On se met au service de l’arme, non l’inverse.
Passer au travail d’armes, c’est aussi repartir à la découverte d’un autre univers plus profond, accepter un nouveau challenge et pouvoir s’exprimer sans retenue.
Le corps au service de l’arme — et non l’inverse
Dans les arts martiaux traditionnels, le corps est souvent vu comme l’instrument principal. Mais avec l’âge, il devient parfois une contrainte. Le travail d’armes renverse cette logique : le corps se met au service de l’arme, qui prolonge l’intention du pratiquant.
Un sabre, un bâton, un couteau bien maniés ne dépendent pas d’un saut de 1 mètre ou d’un mawashi explosif. Ils reposent sur la connaissance du timing, du ma‑ai (distance), de la lecture du mouvement, et de la capacité à s’unir à l’arme. Vieillir, c’est peut-être perdre un peu de vitesse… mais c’est surtout gagner en lucidité.

L’arme comme second souffle : une leçon japonaise
Lors de mon dernier voyage au Japon, j’ai eu le plaisir de pratiquer à nouveau avec Terumi Washizu sensei, un maître de 68 ans. Le poids des années, et celui d’une vie de dur labeur, a marqué son corps. Sa démarche était lente, ses mouvements mesurés.
Mais quand il a saisi son daitō (long sabre) et débuté un kata de Katori Shintō‑ryū, j’ai vu un autre homme. Précis. Fluide. Rapide. Comme si, en posant les mains sur l’arme, c’était elle qui lui prêtait sa force vitale, le ramenant à cet état de pleine présence. C’était de l’unité pure entre l’homme et l’arme.
Un instant suspendu. Une preuve silencieuse que l’arme, bien maîtrisée, transcende l’âge.

Kobudō : le lien vivant entre Karaté et armes traditionnelles
Issu des traditions martiales d’Okinawa, le Kobudō est une discipline à part entière, et pourtant intimement liée au Karaté. Elle propose un travail avec des armes variées : bo (bâton long), tonfa, sai, nunchaku, voire la rame, boucliers dans certains katas anciens. Ces armes sont autant d’extensions du corps et de l’esprit.
Leur pratique développe la coordination, la précision, la force dans le relâchement. Chaque mouvement de bo ou de tonfa oblige à revisiter ses bases, à ajuster ses postures, à redécouvrir le sens du kihon. Là où le pied ne peut plus bondir, le bo trace sa trajectoire, tel un pinceau peignant un trait de vérité dans l’air.
Un programme complet pour la ceinture noire, guidé par Zenei Oshiro sensei, référence du Kobudō d’Okinawa. Un trésor pour tous ceux qui veulent enrichir leur pratique du Karaté et s’ouvrir à un nouveau monde.
Passer au travail d’armes, c’est aussi repartir à la découverte d’un autre univers plus profond, accepter un nouveau challenge et pouvoir s’exprimer sans retenue.

Arnis : de la ceinture blanche à la maîtrise, une progression filmée aux Philippines
L’Arnis, art martial philippin, reste l’une de mes pratiques de cœur. Fluide, intelligent, adaptable, il propose une progression complète, du débutant au pratiquant confirmé. Le bâton de rotin, le couteau, le corps, tout peut devenir vecteur de mouvement et de stratégie.
Ce chemin te permet de redécouvrir la répétition comme on ravive un feu ancien : lente, patiente, implacable.
Aux côtés de Master Dani Faynot, nous avons filmé aux Philippines un programme de 7 heures en Arnis, couvrant tout le parcours « de la ceinture blanche à la noire ». Tu y trouveras des exercices techniques, des éducatifs progressifs, et surtout une logique pédagogique claire pour avancer sans se perdre. Travail du bâton, du couteau, transition vers le combat à mains nues. Un vrai laboratoire d’intelligence martiale.
Passer au travail d’armes, c’est apprendre à lire l’intention, à écouter avec le corps, à s’adapter sans forcer.

Kenjutsu : la voie du sabre, l’essence de la précision
Le Kenjutsu n’est pas seulement une pratique martiale. C’est une discipline de transformation. L’arme noble par excellence, le katana, oblige à une rigueur, une attention, un engagement total. Chaque coupe, chaque déplacement, chaque kamae devient un acte d’intention pure. Le sabre, c’est l’ombre de ton âme dessinée dans l’air.
Cette voie, on la retrouve dans différentes écoles traditionnelles, mais aussi dans des disciplines modernes comme l’Aïkido, où la relation au sabre est omniprésente. On y cultive l’intuition, la réactivité, le calme intérieur, qualités qui ne faiblissent pas avec l’âge : elles mûrissent.
La vidéo Ken no Kihon de Léo Tamaki, expert en Aïkido, propose une progression claire, pédagogique, exigeante pour poser des bases solides et retrouver ce lien sacré entre sabre, esprit et mouvement.

Tantō-jutsu : une finesse stratégique à portée de main
Le travail du tantō (petit sabre) demande une grande subtilité. C’est une voie martiale de proximité, où chaque geste compte, un tracé dans l’air, léger mais décisif.
Avec le tantō, on ne triche pas. On apprend à coller au réel, à sentir avant d’agir. C’est une école de vérité.
Un programme de 4 heures, filmé avec Dani Faynot sensei, te permet de découvrir les fondations du Tantō‑jutsu : déplacements, relâchement, timing, lecture de l’adversaire. Et bonne nouvelle : une seconde partie est en préparation, pour les niveaux plus avancés. Elle approfondira les stratégies d’engagement, les angles d’attaque, la compréhension fine de la distance.
L’arme, égaliseur des différences d’âge
On a parfois l’impression que le temps est un voleur silencieux. Qu’il vient nous retirer un à un nos outils : la souplesse, la vitesse, la puissance.
Mais le travail d’armes remet les compteurs à zéro. Il permet à un homme ou une femme de 60 ans et plus de pratiquer à égalité avec un pratiquant plus jeune. On peut voir régulièrement des anciens, par exemple en Kendo, dominer des plus jeunes. Car l’arme abolît les différences de gabarit, met l’accent sur le timing, la précision, la conscience, et permet d’avancer dans sa Voie.
Dans le dojo, l’arme devient le métronome d’un autre temps : celui de la maîtrise.

Être un avec l’arme
Il y a une « magie » subtile dans le travail d’armes bien conduit. Une fusion. Un moment où l’arme cesse d’être un outil, pour devenir une extension de toi-même.
Tu n’es plus un corps qui tient un bâton. Tu es le bâton. Tu ressens à travers la lame. Tu agis sans délai, sans fioriture. Ce moment de fusion ne demande la vigueur de la jeunesse. Il demande du travail, de la patience, un profond respect pour l’objet que tu tiens et pour ce qu’il représente.
Et cette quête-là, celle d’être un avec l’arme, est peut-être la plus belle des transitions martiales quand on avance dans l’âge. Elle te permet de retrouver la satisfaction de progresser, non de simplement essayer de combattre le temps qui rouille notre corps.
Passer au travail d’armes, c’est aussi repartir à la découverte d’un autre univers, profond, accepter un nouveau challenge et pouvoir s’exprimer sans retenue. L’arme, c’est aussi apprivoiser la vie et la mort.
Pourquoi attendre ?
Si tu te poses aujourd’hui la question de ta pratique martiale pour les années à venir… alors la réponse ne viendra pas du passé, mais du présent. Si tu veux continuer à t’épanouir, à apprendre, à progresser, si tu veux préserver ton corps sans abandonner l’intensité, si tu veux rester martial, sans faire semblant … alors peut-être que c’est le moment de prendre une arme.
Et de l’honorer, l’apprivoiser et ne faire qu’un avec elle.
La lame ne rouille pas
Le temps nous façonne. Il nous courbe parfois, nous freine, nous teste. Mais il ne peut rien contre un esprit engagé. Et ce que le corps ne peut plus exprimer en force, il peut le sublimer en précision, en posture, en intention. La lame ne vieillit pas. Ceux qui savent la tenir, eux non plus.








